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un pasteur expose ses réflexions, quelques pages de son journal

Le pasteur ANGLADE expose ses réflexions pour entrer en débat avec ses lecteurs.Ecrivez moi à : aime.joyeux à gmail.com(remplacez: à par: @ et supprimez les espaces)

émotions et compassion de Jésus

Publié le 17 Février 2009 par Aimé Joyeux in Prédications

Merci au pasteur Matthias Helmlinger de nous envoyer une nouvelle prédication.

pasteur de l’église réformée à Chalon sur Saône, Tournus et disséminés et à Sornay-Branges

 

Marc chapitre 1 versets 40 à 45

 

Un lépreux s'approche de lui; il le supplie et tombe à genoux en lui disant: "Si tu le veux, tu peux me purifier."  Pris de pitié, Jésus étendit la main et le toucha. Il lui dit: "Je le veux, sois purifié." A l'instant, la lèpre le quitta et il fut purifié.

S'irritant contre lui, Jésus le renvoya aussitôt.

Il lui dit: "Garde-toi de rien dire à personne, mais va te montrer au prêtre et offre pour ta purification ce que Moïse a prescrit: ils auront là un témoignage."

Mais une fois parti, il se mit à proclamer bien haut et à répandre la nouvelle, si bien que Jésus ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville, mais qu'il restait dehors en des endroits déserts. Et l'on venait à lui de toute part.

 

La lèpre n’existe plus aujourd’hui chez nous, mais beaucoup de gens ont le sentiment d’être seuls. A notre époque où les moyens de communication existent en surabondance, il est devenu difficile de trouver quelqu’un avec qui avoir une conversation profonde.

Or, le lépreux, c’est avant tout quelqu’un qui vit seul, séparé de la société, coupé de la famille.

On estimait souvent que c’était un châtiment bien mérité, à cause des calomnies qu’il avait répandues. La calomnie apparaît comme la première explication donnée à la lèpre. Dans Talmud Arakhin 16b, par exemple, nous trouvons l’explication suivante : « le lépreux habitera seul (Lév.13/46) car, par ses calomnies, il a séparé l’époux de son épouse, l’homme de son prochain ».

L’isolement appliqué aux lépreux avait aussi une raison prophylactique : on estimait la lèpre contagieuse. Quiconque touchait un lépreux, devenait impur. Il ne pouvait plus aller au Temple, avant d’être passé par un temps de purification.

Calvin dit que la guérison de la lèpre était impossible au bout d’un certain temps. Dans l’A.T., seul Dieu peut guérir de la lèpre. Aucun médecin n’avait de thérapie à l’époque.

Le lépreux qui s’approche de Jésus a donc enfreint la loi. A genoux, il supplie : « si tu le veux, tu peux me purifier ». Pris de pitié, ou pris de colère (les deux traductions sont possibles), Jésus étendit la main et le toucha : « je le veux, sois purifié ».

Nous avons là un résumé de l’évangile. Jésus a des sentiments : compassion, colère. Pourquoi est-il en colère ? A cause du mal, qu’il constate : la maladie a séparé cet homme du peuple de Dieu, elle l’a séparé de Dieu, il ne peut plus aller à la synagogue, ni à fortiori, au Temple. Jésus est bouleversé de pitié et de colère. Il est remué jusqu’au fond des tripes, tout chamboulé en lui-même. Peut-être aussi parce que ce miracle qu’il va faire immédiatement, lui tombe dessus à l’improviste : à travers Jésus, Dieu, le Dieu d’Israël, va rejoindre cet homme séparé d’Israël. Cet homme est séparé d’Israël par la Loi que Dieu Lui-même avait donnée à Israël. En le touchant, Jésus devient impur, selon la Loi.

Et de fait, le prophète Esaïe avait annoncé que le Serviteur de Dieu nous apparaîtrait comme lépreux : « nous l’avions pensé lépreux » « la lèpre est sur lui » (Es.53/4 et 8). Sur la croix, Jésus est mort comme un lépreux : de la mort d’un maudit, comme meurent ceux qui sont séparés de Dieu.

 

Jésus est saisi de compassion et de colère, car en touchant le lépreux, c’est tout son ministère, toute sa personne qui est engagée : il devient impur, pour que nous devenions purs. La compassion est pour nous, la colère est pour la lèpre, pour le péché qui nous colle à la peau.


Ecoutons le commentaire de Calvin sur ce geste de Jésus touchant le lépreux : « en prenant notre chair, non seulement Jésus nous a fait cet honneur de nous toucher de sa main, mais aussi il a été fait un même corps avec nous, afin que nous fussions chair de sa chair ; et non seulement il a étendu son bras vers nous, mais il est descendu du ciel jusques aux enfers : ce néanmoins il n’a tiré de tout cela aucune tache, mais demeurant entier a anéanti toutes nos ordures, et nous a arrosés de sa sainteté ».

Jésus touche un lépreux, il est donc impur comme le lépreux. Jésus meurt sur la croix, et descend au séjour des morts. Mais la résurrection de Jésus vient nous prouver qu’il n’a pas été rendu impur pour toujours, ni par notre péché, ni par notre mort. Calvin dit que Jésus « demeure entier ». Nos « ordures », comme dit Calvin, ne l’ont pas anéanti. Au contraire, c’est Lui qui nous « arrose » de sa sainteté.

 

Il y a des malades que Jésus a guéris seulement par la parole. Il ne pouvait en être ainsi pour ce lépreux : son isolement radical nécessitait qu’il y ait un geste concret de Jésus, pas seulement une guérison à distance. Il fallait ce geste pour que ce lépreux se sente réintégré au peuple de Dieu.

Ce geste, Jésus l’a fait pour Israël dans l’incarnation, et il le fait pour l’Eglise dans la Sainte-Cène, l’eucharistie : il devient chair de notre chair, sang de notre sang.

Le lépreux est si bien réintégré dans le peuple de Dieu, qu’il doit aller au Temple se montrer aux sacrificateurs et offrir le sacrifice de reconnaissance prescrit par la Loi de Moïse.

En lui donnant cet ordre, Jésus lui indique également que c’est bien le Dieu d’Israël qui vient de le guérir, et non pas simplement un guérisseur nommé Jésus.

Mais le lépreux évangélise la région, au lieu de faire ce que Jésus lui avait demandé. Cela nous montre qu’il y a des enthousiasmes dans l’évangélisation qui sont contre-productifs. L’obéissance à l’ordre de Jésus aurait mieux valu que l’enthousiasme. Nous n’ajoutons rien au miracle, en étant démonstratifs avec nos émotions.

Ce ne sont pas nos émotions qui sont importantes, mais celles de Jésus : Jésus est bouleversé. Bouleversé de compassion, bouleversé de colère aussi, colère devant la mort, colère devant la maladie qui réduit l’être humain au désespoir et l’isole de la communauté. Vous ne croyez pas que c’est suffisant ?

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